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Chapitre 3
Le système «culture sur brûlis-jachère» (Continuer)

Semis et plantation

Une fois le champ brûlé, il faut décider du moment de la plantation ou du semis, et des espèces que l'on se propose de cultiver. La décision d'entreprendre la plantation est cruciale. Après le brûlis, le sol est recouvert d'une fine couche de matières riches en nutriments qui sera rapidement emportée par la pluie. Dans les zones humides en permanence, le cultivateur se hâtera de planter après le brûlis. Dans les zones ayant une saison sèche, il faut ensemencer le champ rapidement dès que les pluies ont repris, afin que les plantes puissent utiliser les nutriments avant qu'ils ne soient perdus pour les cultures. En Afrique, on a pu estimer qu'un retard d'une semaine pour les semis pouvait se traduire par une réduction des rendements d'un tiers (Porter 1970). Cette perte est le résultat du lessivage des nutriments par les pluies, et dans une moindre mesure du déficit hydrique qui peut se faire sentir plus tard dans la campagne. Les plantes ensemencées quand le sol est encore sec «produisent un système racinaire étendu, qui met à profit la présence éphémère de grandes quantités de phosphore et autres éléments minéraux. Les cultures semées tardivement, se développant en sol humide ou saturé, ont des systèmes racinaires moins étendus, et sont plus vulnérables à la sécheresse, si elle se fait sentir plus tard dans la saison» (Porter 1970:193).

Par ailleurs, la décision de semer est compliquée par l'incertitude en ce qui concerne les pluies: la saison humide est-elle vraiment commencée, ou faut-il encore redouter une nouvelle période de sécheresse? Comment savoir si les pluies ont commencé pour de bon? Il est courant, chez les cultivateurs pratiquant la culture sur brûlis des régions à saison sèche, de se fonder sur des indices naturels pour prédire l'arrivée des pluies. Les menus changements atmosphériques — vents, mouvements des nuages, couleur du ciel (ciel rougeâtre le soir ou le matin, nébulosité dans l'après-midi, etc.) — sont observés et on en discute longuement (voir Figure 10).

En Afrique de l'Ouest, les indices climatiques s'assortissent de ce que Richards (1985:47) appelle les «indicateurs végétaux» (les pousses feuillues de certaines plantes), ainsi que du chant de certains oiseaux. Dans toute l'Afrique et l'Asie du Sud-Est, l'essaimage des termites s'interprète comme un signe que les «vraies» pluies ont commencé, et non pas les «fausses» pluies qui sont rapidement suivies par un retour de la saison sèche. Peut-on faire des prévisions exactes à partir de tels indices? Il faudrait les étudier davantage, surtout ceux qui sont objectifs (ne prêtant pas à interprétation), par exemple les indicateurs végétaux (Richards 1985). Quoi qu'il en soit, en guettant ces indices, l'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis accroît sa sensibilité au milieu, ce qui lui donne probablement la meilleure base de décision possible et le délivre d'une part de l'anxiété qui entoure sa décision.

Plantation en système de culture sur brûlis.

Comme ces agriculteurs cultivent une grande variété de plantes, ils peuvent échelonner les semis en fonction des conditions qui favorisent le mieux telle ou telle espèce. Telles plantes, ou telles variétés d'une espèce, qui s'accommodent d'une sécheresse relative seront plantées les premières, suivies par les espèces ou les variétés qui demandent de l'humidité. Comme pour le brûlis, si le cultivateur dispose de plusieurs champs, il aura tendance à pousser la diversification plus loin encore, de sorte qu'un champ pourra être ensemencé avant un autre et le cas échéant porter des cultures différentes, dans l'espoir que certaines au moins, dans l'un des champs, bénéficieront des conditions optimales.

Contrairement à l'agriculteur occidental qui s'assied sur le tracteur et «travaille de grandes superficies régulières … et doit, dans une certaine mesure, s'accommoder du bon et du moins bon», l'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis a les pieds dans la terre, peut examiner chaque centimètre de son champ et se permettre d'être sélectif, accordant les plantes aux caractéristiques du sol, à son drainage, à l'ombrage, etc. (Allan 1965:87). Il serait probablement plus exact de dire que ce qu'appréhende ce cultivateur n'est pas le champ dans son ensemble, mais une multiplicité de micro-sites, chacun ayant des caractéristiques propres, dont on tient compte pour le semis ou la plantation (Wilken 1973: Denevan et al. 1984; Conklin 1957; Warner 1981; Salick and Lundberg 1989). Une fois les cultures mises en place, le champ se présente aux yeux du profane comme un mélange de plantes défiant toute notion d'ordre. Mais pour le cultivateur, la diversité des végétaux épouse la diversité que présente le champ et représente la meilleure adéquation possible entre les plantes et les micro-sites.

Figure 10. Asie du Sud-Est: indicateurs locaux du moment des semis

  CultureIndicateurs
Tiruray RizLa position des principales constellations indique la période générale. Le jour précis est fixé d'après la lune, qui indique les jours de bon et de mauvais augure.
 Lieu:Sud-Ouest de Mindanao (Philippines) (Schlegel 1979)
Iban RizQuand les Bintang Banyak (les Pléiades) brillent au zénith juste avant l'aube, le temps est venu de repiquer le riz.
 Lieu:Sarawak (Freeman 1970) 

Au moment du choix d'un site pour le champ, les arbres et les plantes qui y poussent déjà seront le cas échéant protégés en raison de leur caractère comestible, de leurs usages médicinaux, des fibres qu'ils donnent, ou d'autres usages économiques. Outre ces avantages, il est utile de maintenir un minimum de végétation dans le champ pour procurer de l'ombrage, du paillis, assurer une protection contre le vent, servir de tuteur vivant, etc. Cette forme de gestion des micro-sites modifie le climat général du champ en créant des zones présentant les caractéristiques souhaitables (habituellement protection contre la chaleur et le soleil) ou en préservant celles-ci dans la zone cultivée (Padoch et de Jong 1987; Wilken 1973:545).

La gestion intensive des micro-sites serait impossible dans des champs de trop grande taille. C'est la petite taille du champ obtenu par brûlis qui l'autorise. Ce petit champ, quelque pêle-mêle qu'il semble, est le produit final de la mise en pratique des meilleures connaissances traditionnelles concernant les cultures anciennes, les nouvelles cultures, la végétation préservée, les sols, et l'utilisation des micro-climats (Stigter 1984:174).

Cette diversité est encore accrue par la pratique des cultures associées et par la création ou le maintien de microclimats dans les micro-sites. Après avoir été longtemps laissées pour compte comme une méthode désordonnée et inefficace, les cultures associées (ou intercalaires) sont actuellement reconnues comme représentant une stratégie hautement efficace en climat tropical. Non seulement elles permettent d'accorder cultures et micro-sites, mais encore la dispersion des sujets d'une même espèce sur toute la superficie du champ fait également obstacle aux attaques des insectes et des maladies. La pratique qui consiste à échelonner dans le temps la mise en place de plusieurs espèces végétales permet de créer rapidement et d'entretenir une couverture végétale qui protège les sols tropicaux fragiles du lessivage et de l'érosion (Rappaport 1971; Harris 1976).

On trouve en Amazonie et en Asie du Sud-Est, et dans une moindre mesure en Afrique, des champs extrêmement diversifiés, qui présentent des cultures associées étagées reproduisant la structure de la forêt naturelle. Les cultures de base, représentées par différentes variétés de chacune, se répartissent dans tout le champ (Moran 1981). En Amazonie, il est plus fréquent que les espèces soient organisées en bouquets ou en petites zones de peuplement pur, ou parfois en anneaux concentriques, plutôt que d'être intercalées sur toute la superficie du champ (voir Encadré 2) (Beckerman 1983, Beckerman 1984, Hames 1983, Boster 1983). Les deux structures-espèces entièrement intercalées et groupements par zone-ont des points communs: dans les deux cas, on tente de constituer rapidement un couvert végétal, on maintient certains arbres ou plantes déjà présents avant défrichage et on cultive plusieurs variétés des mêmes espèces.

Le fait de mélanger diverses espèces permet d'étaler le travail de semis et de récolte sur une période plus longue que si l'on pratiquait une culture pure. Ne disposer que de la main-d'œuvre familiale constitue une lourde contrainte si les besoins de main-d'oeuvre de l'agro-écosystème présentent des périodes de pointe. C'est là un facteur que l'on néglige souvent quand on compare la monoculture et la polyculture, du point de vue de la main-d'œuvre. La monoculture peut exiger moins de main-d'oeuvre globalement (selon ce que l'on cultive), mais les besoins de travail sont concentrés sur une courte période, et la famille pratiquant l'agriculture sur brûlis ne peut y répondre (voir Beckerman 1983).

Ce problème se pose à nouveau au moment de la récolte. Pratiquer une seule culture, ou consacrer la majeure partie d'un champ à une seule variété culturale, qui nécessiterait d'être promptement récoltée ou transformée (une même variété de riz par exemple) exige un travail dépassant les possibilités d'une seule famille. Or, si la main-d'œuvre nécessaire à la récolte et à la transformation n'est pas disponible au moment voulu, les cultures risquent de rester sur pied dans les champs ou de pourrir dans les greniers.

La polyculture et les semis échelonnés permettent d'organiser une séquence de productions végétales, qui peuvent être récoltées et transformées chacune à leur tour. Les périodes de pointe d'utilisation de la main-d'oeuvre sont ainsi égalisées, et la famille y suffit (Debasi-Schweng 1974:80). Etant donné que les décisions concernant le défrichage, le brûlis et les semis sont habituellement prises par les ménages, individuellement, à l'intérieur de la communauté, il peut y avoir un léger décalage du cycle d'une famille à l'autre. Cela permet de dégager une petite équipe de main-d'œuvre extra familiale pour prêter main-forte un jour par-ci, un jour par-là, car ce qui importe le plus n'est pas tant la quantité de main-d'oeuvre, que sa disponibilité à certains moments clés. Les agriculteurs pratiquant la culture sur brûlis s'efforcent d'éliminer les périodes de pointe et les périodes creuses en jouant sur la diversité et les variations, afin que le flux d'énergie absorbé par le cycle agricole soit aussi régulier que possible.

Encadré 2. Systèmes de production végétale en Amazonie
La documentation témoigne de discussions animées sur les systèmes de production végétale pratiqués en Amazonie. Il est largement reconnu qu'il existe une analogie entre les champs obtenus par brûlis de la zone tropicale humide et la forêt-de nombreuses variétés étant intercalées dans le champ. Mais les recherches ont révélé une structure distincte des champs (avec certaines variations) en Amazonie. On a constaté que les cultures étaient établies en anneaux ou en bouquets purs, plutôt que d'être associées avec d'autres plantes sur toute la superficie du champ.
Ceci peut s'expliquer en partie par les différentes interprétations du concept de culture pure-une espèce, ou une variété d'une même espèce. Le manioc, par exemple, peut être la seule espèce plantée dans une partie du champ, celle-ci étant cependant partagée entre plusieurs variétés. Or les champs, d'une année à l'autre, présentent des variations considérables de qualité et de drainage du sol. Pour s'accommoder de ces variations, la diversité génétique du manioc est activement protégée de manière à ce que l'on dispose toujours de la variété appropriée au micro-site utilisé (Hames 1983:22–24). Une «plantation de manioc en pur peut en fait être considérée comme un système de polyculture de cultivars distincts, présentant des modes de ramification, des formes foliaires et des périodes de croissance parfaitement distincts» (Boster 1983).
Le choix des cultures qui sont pratiquées dans une zone donnée est fonction des besoins particuliers des plantes, de leur vulnérabilité aux ravageurs, et des micro-sites que présente le champ. C'est en fonction de ces micro-sites que l'observateur découvre des «taches» d'une même variété dans le champ. Les Ka'apor, par exemple, plantent les variétés de manioc à croissance la plus rapide, que menacent les fourmis défoliatrices, au centre du champ, et les variétés à croissance plus lente, qui sont à l'abri de ces attaques, à la périphérie. Cette technique vise à mettre autant de distance que possible entre les fourmis et les plantes auxquelles elles s'attaquent le plus volontiers (Balée et Gély 1989; voir aussi Stocks 1983).
Planter le champ en anneaux concentriques pourrait aussi constituer une façon de s'adapter aux conditions du milieu de l'Amazonie, qui sont spécifiques à cette région. Ces plantations en anneaux donnent aux champs une architecture inaccoutumée selon laquelle «un anneau de bananiers/plantains entoure un anneau de manioc, qui entoure à son tour un anneau de plantes à faible développement vertical, par exemple arachides, patates douces, ou petites cultures mélangées». Cette structure végétale se retrouve dans des zones très distantes les unes des autres en Amazonie (Beckerman 1984; Flowers et al. 1982; Stocks 1983). Les anneaux de bananiers/plantains pourraient bien protéger le manioc des principaux mammifères ravageurs: agoutis (Dasprocta punctata), lapas (Cuniculus paca) et pécaris (Tayassu pecari et Pecari tajacu). Comme le bananier et le plantain sont des plantes introduites depuis les premiers contacts avec les européens, avant leur introduction, un anneau de sol dénudé pourrait bien avoir été ménagé autour du manioc pour protéger cette culture, les mammifères répugnant à s'aventurer en terrain découvert. Comme les bananiers et les plantains portent leurs feuilles érigées, le sol continue d'être dénudé pour les animaux, même s'il est effectivement planté. Si les mammifères ravageurs posaient un problème grave dans ces zones, l'élaboration d'une structure en bouquets et en anneaux contribuerait certainement à protéger les champs, alors que des arbres dispersés sur toute la superficie du champ pourraient favoriser les prédateurs (Beckerman 1984).
Une autre explication de la structure concentrique des champs amazoniens repose sur leur rôle dans la gestion et l'amélioration des sols. Chez les Kayapó, le centre du cercle est occupé par diverses variétés de patates douces. Ce cercle central est fréquemment brûlé, selon une pratique appelée brûlis sur champ, qui relève la teneur du champ en potassium. En séparant la patate douce des autres cultures, certaines pratiques de gestion, comme le brûlis fréquent, peuvent être mises en œuvre sans dommages pour les autres plantes. On observe aussi le paillage des patates douces avec des feuilles, de bananiers en particulier, du cercle extérieur vers le cercle intérieur (Hecht et Posey 1989).
Les Bora rassemblent les plantes, en les intercalant avec des arbres fruitiers soit au milieu du champ, soit sur des éminences; leur pratique est l'inverse de celle des Kayapó et des Ka'apor, qui placent les plantes les plus hautes à la périphérie, et les plus basses au centre du champ. La pratique culturale des Bora, qui rassemble les arbres en bouquets, facilite le désherbage, la récolte et l'entretien du verger, alors que la périphérie du champ est laissée en jachère et retrouvre son état de forêt. La régénération de la forêt en système de culture sur brûlis n'est pas gênée par le verger, tandis que la productivité du champ est prolongée dans le temps (Denevan et al. 1984). Le champ amazonien obtenu par brûlis est en général maintenu en production plus longtemps que son homologue d'Asie du Sud-Est et d'Afrique. La part plus importante faite aux racines et tubercules et aux plantains est le fondement de cette différence. Le manioc et la patate douce continuent d'être exploités par semis en relais (on réensemence ou replante au moment de la récolte) pendant deux, voire parfois trois campagnes. Les bouquets de plantains produisent quatre années ou plus. En regroupant les cultures, la production se maintient dans certaines parties du champ, tandis que d'autres, la périphérie par exemple dans le cas cité ci-dessus, reviennent à la succession forestière. Ce mode cultural est polyvalent et bien adapté aux sols pauvres, à la présence de ravageurs, et aux productions culturales de la région.

 Répartition des culturesCultures
BaríAnneaux concentriquesPlantes les plus hautes à l'extérieur, les plus basses vers le centre
BoraPar zone, bouquetsArbres fruitiers au centre ou sur les éminences
CandoshiAnneaux concentriquesPlantes les plus hautes à l'extérieur, les plus basses vers le centre
Ka'aporPar zone, angulaireManioc à croissance rapide au centre
KuikuruPar zone, bouquetsManioc d'une même variété planté dans la même zone
KayapóCercles concentriquesZone centrale dominée par la patate douce; les anneaux secondaires commencent avec le maïs et finissent avec des polycultures manioc/patates douces; l'anneau extérieur comprend l'igname, le bananier, l'ananas, l'urucu et des arbres fruitiers
MekronotiAnneaux concentriquesPlantes les plus hautes à l'extérieur, les plus basses vers le centre
MundurukúAnneaux concentriquesPlantes les plus hautes à l'extérieur, les plus basses vers le centre
YamoamaGrandes zones, choix des plantes en fonction du sol et de l'ombrageGrandes surfaces où le plantain (produit de base) est intercalé avec des plantes annuelles pour recréer diverses zones sur le modèle forestier
YukpaDisposition par zones, avec un certain degré d'association des plantesLa plus grande partie du champ est ensemencée en maïs; des zones plus petites, parfois en blocs, sont traditionellement cultivées en haricots associés avec le maïs. Séquence: maïs → manioc → plantain

Sources: Beckerman 1983b, Denevan et Tracy 1988, Stocks 1983b, Flowers et al. 1982, Carneiro 1983, Balée et Gély 1989, Smole 1989, Ruddle 1974

Pour résumer, à quel moment commencer à semer, que semer, et selon quelle séquence, telles sont les décisions que doit prendre le cultivateur itinérant. Comme pour le brûlis, décider du bon moment pour semer donne lieu à bien des inquiétudes; semer trop tôt ou trop tard imposera des corvées supplémentaires de désherbage, ou donnera de faibles rendements. Les cultivateurs réduisent donc les risques en échelonnant les semis de cultures diversifiées.

Sarclage et protection

Le sarclage est depuis longtemps connu pour être l'un des facteurs déterminants des rendements agricoles sous les tropiques (Chang 1968; Janzen 1973). En effet, la richesse du sol superficiel en nutriments, qui profite aux plantes cultivées, est aussi extrêmement favorable aux plantes sauvages (Uhl 1983). On a en effet estimé qu'un bon sarclage peut accroître les rendements dans la région tropicale et sub-tropicale de 100 pour cent, voire plus (Ashby et Pfieffer 1956). Le sarclage est donc un travail essentiel, faute duquel les rendements diminueront fortement, les cultures pouvant même dans certains cas être entièrement perdues. Un bon brûlis élimine les graines des mauvaises herbes, aussi le choix du bon moment pour le pratiquer est-il déterminant pour le reste du cycle agricole. La quantité de biomasse brûlée n'est pas non plus sans effet; étant donné qu'un bon brûlis est défini comme un feu «chaud», c'est en défrichant, en laissant sécher, puis en brûlant bien une forêt à maturité que les mauvaises herbes seront les moins nombreuses pendant les 6 à 9 premiers mois (Hames 1973:24).

De nombreux chercheurs indiquent l'infestation par les mauvaises herbes comme le facteur déterminant dans la décision de cesser d'investir de la main-d'œuvre dans un champ obtenu par brûlis, plutôt que le risque de voir chuter la fertilité du sol. Quoique les avantages résultant de la forte concentration de nutriments juste après le brûlis se diluent rapidement, la fertilité revenant bientôt à son niveau initial d'avant brûlis (Nye et Greenland 1964; Andriesse 1977), cette chute initiale et la baisse régulière de la teneur en nutriments ne sont pas considérées comme aussi déterminantes dans la décision de défricher un autre champ que l'accroissement des besoins de main-d'œuvre pour le sarclage. Ces besoins continuent d'augmenter, tandis que la concurrence des autres plantes peut entraîner une baisse des rendements et, par conséquent, une réduction de la durée de mise en culture (Greenland 1974). Le moment déterminant est celui où l'élimination des mauvaises herbes du champ déjà établi prend plus de temps que le défrichage d'un emplacement nouveau dans la forêt (Janzen 1973; Nye et Greenland 1960; Sanchez 1976; voir aussi Rambo 1983 et Staver 1989).

Mais toutes les mauvaises herbes ne sont pas équivalentes. Elles font partie intégrante du paysage agricole (Alcorn 1989). Tout ce qui pousse sans avoir été délibérément semé n'est pas nécessairement une «mauvaise herbe». Le sarclage sélectif se pratique dans toute la zone tropicale. Des recherches effectuées en Amazonie ont montré que la moitié des espèces végétales qui poussent dans l'espace obtenu par brûlis n'ont certes pas été semées ou plantées, mais étaient présentes dans le champ avant son défrichage, ou sont apparues au cours de son exploitation (Balée et Gély 1989). Si une plante est utile, elle est «épargnée ou protégée… la décision dépendant de la biologie de l'espèce en question, de la quantité de matière végétale nécessaire, et de l'appréciation individuelle de la question» (Alcorn 1982:401). Une telle contribution de la nature est une aubaine pour le cultivateur pratiquant la culture sur brûlis, car ces plantes deviennent utilisables moyennant un minimum de travail.

Les arbres existants peuvent être recépés plutôt que détruits, surtout ceux qui sont utiles mais ont une croissance lente. Les jeunes plants des essences utiles seront le cas échéant protégés, de telle sorte que dans l'avenir on puisse récolter leurs fruits, leurs fibres, etc., ou en raison de l'attraction qu'ils exerceront sur des animaux que l'on chasse (Denevan et al. 1984; Clay 1988). Les jeunes plants qu'abrite la forêt à maturité peuvent être conservés, ce qui permettra à la forêt de se réinstaller après la période de culture (Olafson 1983). Néanmoins, les espèces ligneuses pionnières et les jeunes plants des essences de la forêt primaire peuvent souffrir du sarclage répété du champ par lequel on tente de réfréner la concurrence avec les espèces domestiques. Uhl (1983) a constaté qu'en Amazonie, où les champs de manioc intercalé sont utilisés plusieurs années de suite, un sarclage répété plusieurs fois par an modifie la végétation naturelle du champ obtenu par brûlis. Les espèces arborées et arbustives déclinent au profit manifeste des espèces herbacées dominantes. Ceci s'explique par la capacité des plantes herbacées de germer, fleurir, et répandre leurs graines entre deux sarclages, donc d'accroître leur densité et de constituer des réserves importantes de graines (Uhl 1983:75–76). Une fois la végétation herbacée installée, le sarclage doit être intensifié, ou bien il faudra décider d'abandonner le champ à la succession naturelle pour en défricher un autre.

Un autre des problèmes auquels se heurte l'agriculteur itinérant est celui des ravageurs. Alors que le paysan exploitant des champs permanents, entourés eux-mêmes d'autres champs portant les mêmes cultures doit craindre les maladies épidémiques, le cultivateur pratiquant la culture sur brûlis doit veiller en permanence aux oiseaux et aux mammifères qui viennent piller ses champs (Poulsen 1978:23). Son objectif est double: prévenir la destruction de son champ et, si possible, s'emparer de l'animal fautif pour la marmite ou la broche. Les mammifères de la forêt peuvent faire d'importants ravages dans les cultures. En Amazonie, les pécaris sont particulièrement destructeurs (Carneiro 1983; Johnson 1983). Pour se garder du pécari, la technique la plus largement appliquée consiste à disperser les champs, ce qui selon les cultivateurs limite la prédation (Johnson 1983). A l'échelle du champ, les plantations en anneau de bananiers et de plantains à la périphérie sont censées décourager les incursions animales (Beckerman 1984), les cultures les plus vulnérables étant placées au centre du champ (Stocks 1983; Balée et Gély 1989).

Ainsi, quoique les animaux prisés comme gibier soient encouragés à s'aventurer dans la jachère par des leurres, fruits tombés de l'arbre et racines comestibles, le cultivateur s'efforce en permanence d'empêcher tout ravageur de pénétrer dans le champ qu'il cultive. La lutte est âpre quand le champ est noyé dans la forêt, comme en Amazonie, ou, en Afrique, perdu dans la forêt claire. Les forêts à maturité, qui sont les plus prisées pour la défriche-brûlis, constituent en même temps un abri naturel pour les animaux, et permettent à ceux-ci de pénétrer facilement dans les champs quand il n'y a personne pour les chasser. Pour parer à cela, le cultivateur construit des plateformes de guet, pose des pièges, installe des épouvantails, abat les arbres qui abritent des nids, dresse des clôtures (Carneiro 1983) et passe des heures à veiller, à guetter, et à attendre.

Les oiseaux granivores, comme le tisserin africain, peuvent ravager un champ de riz ou de mil. Dans bien des sociétés pratiquant la culture sur brûlis, les enfants les plus âgés sont chargés de chasser les oiseaux, occupation qui prend de longues heures mais n'exige guère de savoir-faire, libérant ainsi les adultes pour d'autres tâches.

Les chercheurs qui ont tenté de pratiquer des essais de terrain en zone tropicale se sont heurtés aux mêmes problèmes de protection des cultures que les agriculteurs pratiquant la culture sur brûlis. Nye et Greenland (1964) notent la perte quasi totale d'une parcelle d'essai de manioc et de taro en raison des ravages faits par les agoutis; Maass et al. (1988) ont estimé que 80 pour cent d'une parcelle d'essai de maïs avait été détruite par une horde de pécaris (Tayassu tajocu Alston).

Sarclage d'un champ obtenu par brûlis et cultivé en anneaux concentriques.

Récolte, rendements et transformation

Si le champ obtenu par brûlis a été ensemencé en plusieurs espèces, et avec différentes variétés de chacune, il sera récolté au fur et à mesure que les plantes viennent à maturité. La période de récolte des céréales (riz, mil, maïs) est moins flexible que celle des racines et tubercules. L'un des avantages des racines et tubercules, et du manioc en particulier, est qu'ils peuvent être «stockés» dans le sol et n'être récoltés qu'à mesure que le besoin s'en fait sentir. En revanche, le maïs et le riz doivent être rentrés relativement rapidement, puis emmagasinés. Mais cela étant, les périodes de pointe de travail agricole peuvent être évitées si l'on a pris le soin de semer différentes variétés de céréales, certaines plus précoces que d'autres, à différentes époques. Les diverses variétés viendront à maturité et seront prêtes à être récoltées sur une période étalée sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois, et non pas en l'espace de quelques jours (Warner 1981). Les avantages de la diversification des champs, des cultures, et des semis se répercutent sur le système tout entier, du choix initial du site jusqu'à la récolte.

Les rendements varient en fonction des conditions météorologiques, du choix des cultures, des apports de main-d'œuvre, des maladies, des ravageurs, et de l'emplacement des champs. Les rendements sont habituellement supérieurs dans les champs ouverts dans la forêt à maturité, parce que le brûlis s'y fait mieux, les mauvaises herbes sont moins nombreuses, etc. Certaines cultures, comme le riz, ont des rendements décroissants d'année en année, tandis que d'autres, comme le manioc, semblent peu sensibles à la, répétition (Nietschmann 1973). Même si les rendements baissent au fur et à mesure des semis successifs, la main-d'œuvre nécessaire peut elle aussi diminuer, si bien qu'il en résulte un gain net. Dans un site d'Amérique centrale, on a constaté que la seconde récolte obtenue sur un même champ ne donne que 40 à 50% de la valeur énergétique que l'on aurait tirée de la récolte d'un champ nouvellement ouvert, mais en n'exigeant que 30% de l'apport de main-d'œuvre nécessaire (Nietschmann 1973:148).

L'objectif principal de l'agro-écosystème de culture sur brûlis intégrale est de produire, par le biais d'une allocation de main-d'œuvre à des champs et cultures différents, des cultigènes en quantité suffisante pour subsister. Ces systèmes produisent ce que l'on a appelé un «excédent normal», car ils visent à permettre une récolte suffisante les années où les rendements sont médiocres. «Ils donnent par conséquent un excédent les années normales et aucun excédent les années médiocres, tandis que les années exceptionnellement mauvaises, il y a pénurie ou famine (Allan 1972b:222).» Pourtant même les années exceptionnellement mauvaises, d'autres sous-systèmes peuvent être utilisés dans le cadre de l'agro-écosystème de culture sur brûlis forestière. La chasse, la pêche et la cueillette peuvent être intensifiées jusqu'à la prochaine récolte de plantes cultivées. C'est cette palette de solutions qui donne à ces agroécosystèmes leur stabilité et leur durabilité.

Récolte du riz en Asie du Sud-Est.

Certaines plantes cultivées exigent peu de transformation. La pomme de terre et la patate douce, par exemple, doivent seulement être récoltées, et sont prêtes à être consommées après cuisson. D'autres en revanche exigent des heures de travail pour devenir consommables. Le manioc, qui contient des substances toxiques, doit être râpé, pressé, et transformé soit en galette, comme en Amérique latine, soit en bouillie, comme en Afrique. Le riz exige aussi beaucoup de travail. Après la récolte, il doit être transporté jusqu'au grenier, battu, et emmagasiné. Une fois battu, il doit être conservé au sec, sans quoi il se gâte. Toute l'année, le village est parsemé de nattes couvertes de riz, chaque ménage faisant tourner ses réserves de riz en fonction du cycle de séchage. Le riz battu doit être décortiqué et nettoyé. Mais comme le riz décortiqué se conserve mal, il est normalement préparé par petits lots, sur une base hebdomadaire ou même quotidienne, ce qui permet d'étaler le travail de décorticage et de nettoyage sur toute l'année.

Succession et rotation

Pour qu'un agro-écosystème de culture sur brûlis perdure, les champs, après culture, doivent revenir à l'état forestier (Moran 1981:55). En zone tropicale humide, la succession naturelle permet à la forêt de se reconstituer si le champ n'a pas été utilisé trop longtemps, et s'il n'est pas trop grand (Manner 1981:372). Mais combien de temps prend la succession forestière? Quels en sont les mécanismes?

Une étude faite en Amazonie a permis de constater que dans un premier temps le champ est colonisé par des espèces herbacées annuelles, mais qu'au bout d'un an les espèces ligneuses pionnières commencent à éliminer celles-ci du fait de leur ombrage. Les espèces ligneuses pionnières proviennent des graines produites par la forêt adjacente. L'établissement des espèces ligneuses est favorisé par la présence de micro-habitats (micro-sites), par exemple les arbres fruitiers et les troncs laissés au sol, qui fournissent aux jeunes plants un micro-climat favorable (Uhl 1983; Wilken 1972). Les arbres fruitiers eux-mêmes sont à l'origine d'une dispersion de graines, car ils attirent les oiseaux et les chauvessouris qui, pendant qu'ils se nourrissent, défèquent et ensemencent le sol. L'ombrage procuré par les arbres protège les jeunes plants du rayonnement solaire direct, et peu à peu les «îlots de végétation ligneuse» se développent jusqu'à se rejoindre, l'espace précédemment occupé par le champ étant couvert tout entier par un recrû secondaire. Ces arbres de première génération meurent au bout de 5 à 10 ans, et sont progressivement remplacés par les espèces forestières à croissance lente. Uhl a estimé qu'il faudrait 100 ans pour que les champs reviennent à l'état de forêt primaire, et il a souligné l'importance des micro-sites offerts par les arbres restants et les troncs au sol dans le processus de réinstallation (Uhl 1983:75–78).

La succession naturelle permet à la forêt de se régénérer si le champ n'a pas été utilise trop longtemps, et s'il n'est pas trop grand.

Quel rôle l'agriculteur itinérant joue-t-il dans la régénération de la forêt? Il n'y a pas longtemps encore, on estimait généralement qu'il se contentait de laisser la nature suivre son cours et qu'il abandonnait son champ afin que la forêt se reconstitue. Mais cette interprétation est actuellement mise en cause, des études ayant révélé que l'agriculteur intervient activement pour façonner le reboisement de la jachère. Par exemple dans l'étude citée ci-dessus, ce sont les arbres fruitiers plantés ou protégés par l'homme qui permettent aux espèces ligneuses de s'établir à nouveau dans le champ obtenu par brûlis (Uhl 1983). Comme cette manipulation de la jachère porte sur «une combinaison de cultures annuelles, de cultures arbustives pérennes, et de recrû forestier naturel», elle est actuellement considérée comme une forme d'agro-foresterie, dénommée «traditionnelle» ou «indigène» (Denevan et Padoch 1988a:1, voir aussi Olafson 1983; Denevan et al. 1984; Padoch et de Jong 1987).

Si de nombreux groupes se rendent compte qu'il importe de préserver les arbres sur le champ, c'est plutôt en vue d'une utilisation immédiate (fruits, tuteurs vivants, ombrage pour les plantes sciaphiles, etc.), de la reconstitution de la forêt, ou pour attirer le gibier dans l'avenir, que pour prévenir l'érosion des sols (voir Wilken 1972; Conklin 1957; Geertz 1963; Watters 1960; Vermeer 1970; Harris 1976). L'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis peut manipuler activement la succession végétale de sorte que certains arbres appréciés deviennent dominants. Cela s'opère par défrichage sélectif, ou, plus rarement en plantant les espèces prisées, ce qui revient à diriger la succession.

Les Siane de Nouvelle-Guinée, par exemple, favorisent la croissance du Casuarina en désherbant les jardins de manière à ce que l'espèce herbacée kunai n'étouffe pas les jeunes plants de Casuarina. Ce désherbage sélectif aide les jeunes plants d'essences forestières à s'établir puis à survivre. Dans les jardins, les Casuarina sont normalement spontanés, mais de jeunes exemplaires peuvent être plantés dans les zones où ils n'apparaissent pas spontanément (Olafson 1983:156–157, qui cite Salisbury 1962:43). Ce désherbage sélectif met en place le schéma fondamental de succession de la jachère productive.

Même si la plantation d'arbres pour enrichir les jachères est relativement rare en comparaison de la pratique quasiment universelle de gestion de la végétation préexistante ou des espèces pionnières, on y a parfois recours. Au Nigéria par exemple, les Ibo plantent Acioa barterii, et les Iboibo intercalent Macrolobium macrophyllum entre les plants d'igname et de manioc pour accélérer la reprise de la jachère. Au Nigéria encore, Gliciridia sepium, dont on estime qu'il réduit à deux ans la période de jachère indispensable, sert de tuteur vivant à l'igname, et rejette pour occuper le champ (Benneh 1972; Weinstock 1985; Getahun et al. 1982). La fréquence relativement faible de la plantation directe pourrait être liée à l'appréciation des ressources disponibles. Les agriculteurs pratiquant la culture sur brûlis intégrale en forêt sont animés du désir d'accroître la diversité des ressources et de favoriser la succession de plantes utiles dans la jachère. Les droits de récolte appartiennent à ceux qui ont défriché puis planté le champ. Une fois que la succession forestière a atteint une certaine phase, normalement au bout de dix années ou plus, ces droits se diluent progressivement et tombent en désuétude, surtout s'il existe de grosses réserves de terres propres aux cultures ou si le village se déplace, ou bien si le ménage change fréquemment de résidence.

Lorsque des cultures de rente ont été plantées, la situation est différente de celle que l'on rencontre dans le cas de la jachère améliorée. En Afrique, où les cultures de rente dominent déjà, et où se fait sentir la pénurie de terres, les droits fonciers sont plus codifiés, et mieux défendus. L'agriculteur nigérian qui met en place une jachère buissonnante affirme son droit d'utiliser la terre pour des cultures - celle-ci ne restant pas à l'état de jachère suffisamment longtemps pour que la forêt se reconstitue, ni pour qu'elle retourne à la réserve commune de terres pour la culture sur brûlis (Benneh 1972).

Quoique différents groupes pratiquant la culture sur brûlis, dans diverses régions, aient adopté au niveau local des modalités préférentielles de succession végétale, le processus fondamental est analogue: en pratiquant le désherbage sélectif, et, dans certains cas, la plantation d'arbres, ils assurent une succession forestière qui sera utile dans toutes ses phases. Cette stratégie «a pour objet de répondre au dilemme du cultivateur itinérant, à savoir maintenir la production de son champ en fin de cycle cultural, tout en permettant à la forêt de se régénérer» (Denevan et al. 1984:349; Harris 1976).

Cette gestion active a dans une certaine mesure été ignorée par ceux qui méconnaissaient l'agro-écosystème de culture sur brûlis. Les jachères forestières ont été longtemps considérées (et le sont encore) comme étant «abandonnées», terme qui donne l'impression que le champ ne produit plus rien pour des usages ultérieurs, ou que l'agriculteur s'en désintéresse totalement. On s'est peu préoccupé de la jachère et de sa gestion en raison de cette incompréhension (Padoch et de Jong 1987:179). Mais loin d'être abandonné, le champ obtenu par brûlis évolue de l'état de champ «dominé par les plantes cultivées vers celui d'une jachère à maturité composée intégralement de végétation naturelle» (Denevan et al. 1984:347). Le champ se transforme donc, son produit n'étant plus par exemple des légumes cultivés, mais du gibier, des matériaux de construction, des plantes médicinales, etc. (Beckerman 1983:7). Les façons culturales qui sont appliquées aux jachères forestières ne sont pas nécessairement périodiques ou systématiques (Padoch et de Jong 1987:180), et elles échappent facilement aux observateurs qui ne sont en contact avec la communauté qu'un an ou deux. Pourtant leur incidence ne doit pas être négligée.

Les éléments biotiques de la jachère sont sélectionnés par la protection des espèces volontaires, la plantation et le désherbage, aussi la forêt qui en résulte est-elle pour une grande part anthropique (Denevan et al. 1984; Nigh et Nations 1980; et Gordon 1982:73–78). L'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis manipule activement le processus naturel de succession pour inclure davantage d'espèces utiles que n'en donnerait la «succession naturelle» (Irvine 1989). Cette gestion de la forêt fait intervenir des interventions «intermédiaires», dans lesquelles la forêt n'est ni détruite ni ne reste inutilisée, ce qui rend possible l'utilisation durable de zones de ressources à différents stades de la reconstitution et de l'entretien de la forêt (Nations et Nigh 1980; Denevan et Padoch 1988). Au cours de son retour à l'état forestier, le champ continue de produire des fibres, des légumes, des plantes médicinales, etc., et il constitue un élément nécessaire et irremplaçable de l'agro-écosystème (Hoskins 1982).

Le résultat de ce processus de gestion des ressources est l'existence de vastes forêts anthropiques. Les forêts tropicales, autrefois considérées comme «vierges» (c'est-à-dire jamais coupées), sont maintenant perçues comme des forêts «à maturité» qui ont jadis été jardinées par l'homme. Spencer (1966) suggère que les forêts à maturité de l'Asie du Sud-Est ne sont probablement pas vierges, tout comme Richards (1973b) en ce qui concerne l'Afrique, tandis que Denevan et al. (1984:347) estiment qu' «autrefois de vastes pans de la forêt amazonienne pourraient effectivement avoir présenté divers stades d'une jachère de culture sur brûlis productive». Les forêts tropicales manifestent des signes de manipulation, tant en ce qui concerne la diversité des espèces utiles aux habitants de la région qu'en ce qui concerne la présence de bouquets d'arbres que l'on ne rencontrerait pas dans le cas d'une succession naturelle» (voir Denevan 1984; Getahun et al. 1982; Benneh 1982; Okigbo et Lal 1979).

Certaines forêts n'existeraient pas sans l'intervention de l'homme. Certains groupes, comme les Kayapo, ont créé de toutes pièces des îlots forestiers qui les approvisionnent en vivres et les abritent au cours de leurs pérégrinations dans la savane. Après avoir choisi une petite dépression susceptible de retenir l'eau de pluie, les Kayapo transportent du paillis sur le site, et le mélangent avec de la terre de termitières et de fourmilières. Sur ces monticules, ils plantent des graines, de jeunes plants, ou des boutures. Peu à peu ces îlots grossissent, et à mesure qu'on y apporte du paillis et qu'on y plante, il se constitue des taches forestières de grande superficie dans la savane. Ces «îles» sont strictement des artefacts, car sans les interventions des Kayapo, elles ne se seraient pas constituées (Posey 1984, 1985; Anderson et Posey 1989). Les techniques de gestion locales sont assurément subtiles, mais leurs effets peuvent être massifs.

Pour résumer, l'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis perçoit son champ comme «une ouverture dans la forêt», qui retournera à la végétation forestière par succession. En plantant ou en protégeant des espèces prisées dans le champ, la végétation qui prendra la relève comportera des plantes plus utiles à l'agriculteur que ne le ferait le produit d'une succession naturelle. Le retour à la forêt est souhaité, car s'il ne se faisait pas, la terre serait perdue pour le système de culture sur brûlis. C'est pourquoi l'agriculteur itinérant a pour objectif non pas de détruire la forêt, mais, par le défrichage bien dosé et la gestion judicieuse du retour du champ à la forêt, d'obtenir une récolte continue de cultigènes à mesure que s'établit une nouvelle forêt, riche par sa diversité et présentant des peuplements recherchés localement.

GESTION DES RESSOURCES: LA CHASSE ET LA PECHE COMME ELEMENTS DE L'AGRO-ECOSYSTEME

Théoriquement, l'agriculteur pratiquant la culture sur brûlis intégrale exploite les ressources de zones très diversifiées: champs, jachères, jardins de case, forêts et, parfois, petits cours d'eau et bandes côtières. En Asie du Sud-Est on trouve aussi des plantations extensives de cultures de rente comme l'hévéa, le caféier, le poivrier et le pavot. La riziculture irriguée, parfois d'introduction récente, parfois pratiquée de longue date, peut venir s'ajouter aux champs obtenus par brûlis. En Afrique, des cultures de rente comme le cacaoyer, le caféier, l'hévéa, et le palmier à huile semblent universelles. Sous l'effet d'une densité de population supérieure et de la pratique des cultures de rente sur de grandes superficies, la plupart des agriculteurs pratiquant la culture sur brûlis ont des «champs proches», sous culture intensive, et des «champs éloignés», qui continuent d'être exploités par rotation. Le déclin des ressources forestières en Afrique a conduit à intensifier et à généraliser les cultures de rente. En Amazonie, surtout dans les zones à l'abri des contacts avec l'extérieur, une riche palette de ressources demeure, et continue d'être exploitée.

Les populations de la forêt tropicale et de la savane font usage de sources de protéines que les observateurs occidentaux pourraient négliger de noter d'autant plus facilement qu'elles ne font pas partie de leur propre régime alimentaire. En Afrique par exemple, on mange couramment des termites rôtis, qui représentent un apport nutritionnel important, étant à la fois riches en protéines et en énergie (Mielke 1978; Bodenheimer 1951; Miracle 1973). On consacre un temps non négligeable à attraper des termites: Schlippe (1956) a estimé que les Azande passaient 26 pour cent de leur temps de travail à la saison des pluies à capturer ces insectes. Les termites essaiment au début des pluies, et sont une source de nourriture lorsque les réserves vivrières s'amenuisent.

Les larves, termites, fourmis, grenouilles, etc. sont capturées et mangées avec plaisir dans toute l'Amazonie. Les Desanâ du Brésil, comme d'autres groupes, consomment des insectes et leurs larves, qui ont une part importante dans leur alimentation, surtout au cours des périodes de l'année pendant lesquelles les cours d'eau sont trop boueux pour la pêche (voir Figure 11). Quoiqu'il s'agisse d'une activité de cueillette, la présence des larves est parfois activement favorisée par la création d'habitats propices, par exemple en plantant des arbres comme Inga spp. (légumineuse) sur lesquels viendront pondre les insectes, et en respectant les termitières et les fourmilières (Dufour 1983; Ribeiro et Kenhiri 1989). Il arrive que soient créés des habitats particuliers pour attirer les insectes pondeurs (par exemple bananiers morts, épis de maïs) en vue de la récolte des larves au bon moment (Denevan 1971).

La chasse et la pêche sont des éléments importants de l'agro-écosystème. Quoique l'on ne s'accorde pas sur la gravité du problème, le manque de protéines du régime alimentaire amazonien fondé sur les plantes locales est une contrainte potentielle qu'il faut surmonter. Les estimations de l'insuffisance protéique de ce régime sont basées sur la faible valeur nutritionnelle du manioc, qui est l'aliment de base de la majorité des groupes indigènes, ce qui oblige à exploiter d'autres éléments de la base de ressources - par la chasse, la pêche et la cueillette - pour assurer un apport suffisant en protéines (voir Sponsel 1989). Le plus fréquemment, les hydrates de carbone proviennent des champs, et les protéines des éléments naturels de l'agro-écosystème, grâce à une exploitation habile de la base de ressources.

La chasse est facilement intégrée au cycle de culture sur brûlis. Les cultivateurs tirent parti de leurs champs ouverts par défriche-brûlis et des zones en jachère pour attirer et piéger le gibier. Dans la zone tropicale humide, la densité des populations de mammifères est généralement faible, mais les champs et jachères attirent le gibier et supportent des populations animales plus fortes que la végétation naturelle. Les petits champs dispersés des cultivateurs itinérants créent des «corridors naturels» dans la forêt, qui servent de réserve pour les espèces végétales et animales. La combinaison de champs, de jachères et de forêt favorise le développement de la faune sauvage et enrichit les ressources naturelles (par exemple les populations de mammifères forestiers) au bénéfice du cultivateur pratiquant la culture sur brûlis (Linares 1976; Ross 1978; Gomez et al. 1972; Lovejoy et Schubert 1980; Posey et al. 1984).

En Asie du Sud-Est, les cours d'eau de montagne sont trop petits et parfois trop reculés pour abonder en poissons. C'est pourquoi, sauf en ce qui concerne quelques populations de la côte, la chasse l'emporte sur la pêche. Il est fréquent d'élever des chiens pour chasser le cochon, même si les soins dont bénéficient ces auxiliaires varient sensiblement. Les animaux domestiques comme la chèvre, le mouton, le cochon et le cheval sont plus répandus sur le continent que sur les îles, quoique le cochon sauvage soit chassé dans des zones où l'on n'élève ni ne consomme de porcs domestiques (Spencer 1966; Warner 1979).

Dans le Bassin amazonien, les Yanoama, Achuara, Ye'kwana, Yukpa, Kayapó, Ka'apor, Sirionó, Bora, etc., chassent tous sur leurs champs et leurs jachères. Les vieilles jachères, qui présentent un mélange de forêt, de plantes cultivées dégénérées et de fruits tombés, sont notoirement les meilleurs terrains de chasse - les animaux y sont moins aux aguets, et l'on peut y installer des caches difficiles à déceler (Smole 1989; Chagnon 1983; Ross 1978; Hames 1983c; Ruddle 1974; Posey 1985; Balée et Gély 1989; Balée 1989; Holmberg 1950; Denevan et al. 1984).

Les populations amazoniennes vivent de culture et de chasse depuis très longtemps. Néanmoins aucune surexploitation ne semble s'être produite; au contraire, on conserve volontairement les ressources animales (Roosevelt 1989). Les groupes indigènes exercent, habituellement par le biais d'interdits alimentaires liés aux mythes et aux croyances religieuses, une certaine limitation de la chasse (Ross 1978). La religion des Desanâ et des Tukano du nord-ouest de l'Amazonie, par exemple, repose sur la croyance en un cycle fini de l'énergie, sur lequel repose la fécondité des animaux et de l'homme. Il est communément admis qu'une population humaine trop importante déséquilibrerait le système énergétique tout entier, et que les populations animales déclineraient si on les chassait à l'excès. Pour sauvegarder l'équilibre, les Tukano limitent la taille de la famille par le biais de tabous sexuels, et contrôlent la fréquence de la chasse par des pratiques rituelles. Ils perçoivent leur environnement comme créé de main d'homme, «non pas tant comme résultant des activités d'exploitation de leurs ancêtres mais comme ayant été imprégné par ceux-ci de signification symbolique». De par leurs pratiques religieuses, ils participent activement à l'entretien de leur écosystème en limitant leur effectif et leur activité prédatrice (Reichel-Dalmotoff 1977:5; Bodley 1976; Lathrup 1970).

On constate aussi dans cette même zone une gestion des ressources que constituent les pêcheries. Les cours d'eau du Bassin amazonien se répartissent entre trois catégories: eau blanche, eau noire et eau limpide. Ces appellations traduisent la charge des eaux en alluvions, leur couleur, leur limpidité, et leur teneur en nutriments. L'Amazone et certains de ses affluents sont des eaux blanches, qui transportent des sédiments provenant de la chaîne andine. Elles sont riches en nutriments, mais leur turbulence et leur turbidité limitent la production primaire de phytoplancton. Les rivières à eau noire doivent leur teinte sombre à la matière humique dissoute, elles sont transparentes, pauvres en nutriments et acides. Les eaux limpides sont analogues aux eaux noires en ce qui concerne les nutriments, mais elles sont exemptes de coloration sombre étant donné qu'elles ne contiennent pas de matière humique en solution (Hames et Vickers 1983:4).

Figure 11. Calendrier de pêche et de cueillette Desanâ

Constellation*Conditions météorologiquesPêche et cueillette
OCTOBRE  
Vipère1Grosses pluiesCueillette de champignons
NOVEMBRE  
Vipère, ronde, queueGrosses pluiesCueillette de champignons
DECEMBRE  
Vipère, ronde, queueGrosses pluies (crues)Première ponte des poissons Capture de grenouilles, premier vol de termites
JANVIER  
Pas de constellationPériode sèche (5 jours) 
 Une autre période sèche: été «inga»2 vers la fin du mois: 8–15 jours 
Tatou, fémurPluies pas assez fortes pour provoquer des cruesCapture de grenouilles
FEVRIER  
TatouPluiesDeuxième ponte des poissons
MARSPériode sèche «cucura»3 - 4 jours 
 Petites pluies 
 suivies par deux semaines de temps sec: été du «palmier pêcher» 
AVRIL  
CrevettePas toujours pluvieux; quand le temps reste sec, l'été du «palmier pêcher» se poursuit jusqu'à la mi–avrilTroisième ponte des poissons
Jaguar, mentonGrosses pluies, inondations deux ou trois journées ensoleillées entrecoupées de pluies 
Jaguar, corpsGrosses pluies intermittentes période sèche, 4 ou 5 jours: saison sèche des fruits «umari»Vol de termites, de fourmis «nocturnes» et broyeuses de feuilles
Jaguar, queue, rondeGrosses pluiesFin de la capture de grenouilles, de la ponte des poissons et des vols de termites et de fourmis
MAI-mi JUIN  
Etoile, morceauPluies intenses, crues permanentes 
Poisson, fuméPluies intenses, crues permanentes 
Gourde avec pulpe d'umari, sur claiePluies intenses, crues permanentesPêche à la ligne avec hameçon Vol de termites Larves comestibles attachées à Cunuria spruceana, Euphorbiacées, et mangeant Sterculia sp., feuilles de sterculiacées
JUIN  
 Trois jours sans pluie 
Ornement emplumé AdzePluiesCapture de petits poissons On continue de ramasser des larves comestibles
JUILLET  
LoutrePluiesVol de sauterelles (capture à la main)
Oiseaux, très jolisPluies 
Crabe, très joliPluies 
AOUT  
Etoile, morceauPluies (rivières pleines)Larves comestibles, qui mangent les feuilles d'Erisma japura, Vochysiacées; la chenille qui mange les feuilles de Minquartia guianensis, Olacacées; la chenille qui mange les feuilles d'inga (c'est pourquoi l'inga est planté près des champs et dans les villages) Chasse au paca (Cuniculus paca)
SEPTEMBREDeux à trois jours sans pluie:
larve, vieil été
 
Grue, crue 
 Pluies 
 5 jours sans pluie: larve, jolie, étéOn mange les dernières larves
 PluiesDernier vol de termites
 5 jours sans pluie: épine, été 
Nota: * Les noms des constellations sont les mêmes qui sont donnés aux pluies tombant au cours de la période où elles sont visibles: par exemple, les pluies qui tombent quand la queue de la vipère est visible sont les «pluies de la queue de la vipère».
1 Illumination de la vipère, puis tête, puis corps, puis oeufs de la vipère.
2 L'inga est un fruit que l'on cueille et consomme à cette période de l'année (Inga spp., Légumineuse)
3 Le cucura est un fruit que l'on cueille et consomme à cette période de l'année (Pourouma cecropiaefolia, cecropiacées).
Source: Ribeiro et Kenhíri 1989

Les groupes Tukano qui sont tributaires de la pêche gèrent leurs ressources aquatiques comme des groupes analogues, tributaires de la chasse, gèrent leurs ressources animales. Les Uanano Tukano résident dans le Bassin de l'Uaupés, une plaine d'inondation à eau noire remarquable par l'absence de nutriments dans les rivières et les sols environnants. Les rivières à eau noire ne sont pas assez riches en nutriments pour produire de grandes quantités de phytoplancton primaire et, si elle dépend exclusivement de la production primaire en début de chaîne alimentaire, la production de poisson est donc limitée. Or ces rivières disposent d'une autre source de nutriments, à leur «marge terrestre», qui procure les éléments nutritifs nécessaires aux poissons avec les feuilles et le paillis, les insectes, les fruits, les graines, etc. Ces nutriments pénètrent dans le système aquatique essentiellement lors des crues périodiques. Lorsque le niveau de l'eau monte, le poisson se disperse dans la forêt inondée et «se nourrit des ressources abondantes qui deviennent ainsi disponibles». Les Tukano sont conscients des relations entre la forêt et le poisson, et ne cultivent jamais les marges terrestres des cours d'eau, qui sont «préservés comme pâturage appartenant aux poissons» (Chernela 1989:242).

La gestion des pêcheries fait partie intégrante des croyances religieuses des Uanano:

«La nature est conçue comme une série de frères, prévenants et généreux quand ils sont traités avec respect, mais vengeurs et prompts à châtier si on les traite avec arrogance; … les échanges pacifiques et ordonnés … sont tolérés… mais les comportements gloutons sont punis par de redoutables anciens, protecteurs des poissons. Les relations entre l'homme et le monde naturel sont harmonieuses aussi longtemps que les limites convenables sont respectées» (Chernela 1982:17).

Les Uanano, en préservant les marges forestières, ont le sentiment de cultiver leur relation réciproque avec le poisson, ce qui leur permet de l'exploiter, mais sans dépasser les capacités de la pêcherie dont dépend leur survie. Dans une région où les sols sont médiocres et les rivières pauvres en nutriments, ils ont créé un agro-écosystème durable et productif.

Traditionnellement, lorsque les éléments «éloignés» de l'agro-écosystème sont épuisés, les agriculteurs itinérants se déplacent vers d'autres territoires. En Afrique, la pratique des cultures arbustives de rente repose sur la permanence de la résidence, aussi les cultivateurs n'ont-ils plus la possibilité de migrer vers des zones nouvelles. Quoiqu'ils continuent d'exploiter la brousse (en forêt secondaire ou en jachère à maturité) pour en tirer du gibier et des produits de cueillette, cette base de ressources est en déclin sous l'effet de l'accroissement de la pression démographique sur la forêt et la faune sauvage (Okigbo 1982). Les produits que l'on cueillait ou chassait il n'y a pas si longtemps sont désormais achetés, ce qui rend les cultivateurs plus tributaires encore de leurs cultures de rente.

Pour résumer, la culture sur brûlis intégrale telle que la pratiquent les populations autochtones de toute la zone tropicale est le principal élément d'un agro-écosystème complexe reposant non seulement sur l'agriculture, mais aussi sur la chasse, la cueillette en forêt, et dans certaines régions, la pêche. La gestion des ressources naturelles est axée sur l'utilisation des processus naturels pour entretenir la diversité de l'écosystème forestier plutôt que de la simplifier en permanence par l'intervention humaine. La forêt est certes coupée, mais si le défrichage se fait sur de petites superficies, distantes les unes des autres, et si l'on pratique le désherbage sélectif et plante ou protège certains arbres, on aide la forêt à se réinstaller. Le champ obtenu par brûlis n'est pas une entité autonome, mais représente le premier stade du retour à l'état forestier.

Pêche dans le Bassin amazonien.

D'autres ressources, comme la faune terrestre et aquatique, sont également gérées dans le cadre d'une vision du monde qui intègre la pérennité, bien au-delà de l'utilisation immédiate. Bien nourries, sans carences protéiques, les populations vivent dans une relation stable avec l'environnement naturel, gérant activement leurs ressources agricoles, et les possibilités de cueillette, de chasse et de pêche. Il ne s'agit point d'une adaptation rigide, mais d'une réponse souple aux variations de l'environnement ou aux spécificités d'un terroir ou d'un autre (Hames et Vickers 1983).


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